jeudi, avril 24, 2008

Simon Stocker à propos des implications du Traité de Lisbonne

Source : Concord Flash 50, mars 2008



La concrétisation des avancées inscrites dans le Traité de Lisbonne en matière de politique de développement est conditionnée à sa ratification dans les mois à venir.

Le nouveau Traité stipule clairement que c’est la politique de développement communautaire qui cadre la coopération entre l’Union européenne (UE) et l’ensemble des pays en développement. Il fait de l’éradication de la pauvreté un des objectifs principaux de la coopération au développement et considère la réalisation des Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD) comme un axe essentiel. Le Traité reste également attaché au principe suivant lequel toutes les politiques communautaires ayant une incidence sur les pays en développement doivent être cohérentes par rapport aux politiques de développement de l’Union et à leur mise en œuvre. Pour la première fois, le Traité introduit également une disposition légale relative à l’aide humanitaire de l’UE partout dans le monde.

Même si le Traité répond à nos attentes en renforçant la base juridique de la politique de coopération au développement communautaire, c’est au pied du mur qu’on verra le maçon. Dès le processus de ratification terminé, les négociations relatives à sa mise en œuvre suivront. Or les modalités de fourniture de l’aide au développement soulèvent de nombreuses d’interrogations restées sans réponse. Quel sera par exemple le rôle exact du Haut représentant de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité en matière de coopération au développement ; comment le Service européen pour l’action extérieure (SEAE) fonctionnera-t-il ; quelles seront les conséquences du Traité de Lisbonne pour le budget communautaire; et quel sera le rôle du Parlement européen (PE) dans les politiques de coopération au développement ? Les négociations à venir devraient apporter des réponses, mais les ONG ne doivent pas attendre que les carottes soient cuites pour prendre position.

Quelques arguments et réponses
Le monde politique doit reconnaître que le Traité de Lisbonne accorde à la coopération au développement et à l’aide humanitaire une place distincte dans les relations entre l’UE et le monde en développement en autorisant aujourd’hui comme demain le maintien d’un Commissaire spécialement en charge de la coopération au développement et de l’aide humanitaire, dont le mandat couvrirait non seulement les pays en développement repris dans la liste du CAD de l’OCDE mais aussi d’autres dossiers de développement. Ce Commissaire devrait bénéficier de l’appui d’une Direction générale spécifique, en charge non seulement de l’élaboration mais également de la mise en œuvre des politiques de développement et d’aide humanitaire.

Il s’agit donc de nuancer la mission du Haut représentant de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité. Ce Haut représentant siégera au Conseil de l’UE et présidera le Conseil affaires générales et relations extérieures. Il ou elle aura également un pied à la Commission en tant que Vice-président(e) chargé(e) de coordonner l’ensemble des domaines de politique extérieure : les politiques étrangères et de sécurité qui ressortent du mandat du Conseil ainsi que les politiques pour lesquelles la Commission est compétente – y compris le développement, le commerce, la coopération économique et l’aide humanitaire. En tant que coordinateur(trice), il ou elle devra veiller à ce que le Commissaire en charge du développement et de l’aide humanitaire puisse pleinement assumer ses fonctions et à ce que les politiques de développement et d’aide humanitaire ne soient pas subordonnées à d’autres politiques de relations extérieures.

Pour s’acquitter de sa mission au Conseil et à la Commission européennes, ce Haut représentant pourra compter sur le soutien du Service européen pour l’action extérieure. On ignore encore comment ce service va s’intégrer dans le schéma administratif et budgétaire de la Commission et du Conseil, mais il est clair qu’il doit impérativement accorder une place distincte et un financement adéquat au développement et à l’aide humanitaire pour que puissent pleinement se concrétiser les objectifs européens d’éradication de la pauvreté et de réalisation des OMD.

Le Parlement européen incarne le contrôle démocratique. Bien que le Traité de Lisbonne confère davantage de prérogatives au PE, son pouvoir de contrôle sur la coopération au développement doit être amélioré et pleinement mis en œuvre. Par le passé, le PE, en qualité de co-législateur, a veillé à ce que les fonds alloués, via l’instrument de coopération au développement, financent des actions de développement légitimes, telles que définies par les accords conclus dans le cadre du CAD. Il faudrait que le PE puisse avoir le même impact sur le FED en budgétisant ce dernier, maintenant que le Traité de Lisbonne a créé un espace pour ce faire.

En tant qu’ONG, nous devons peser de tout notre poids sur ces exigences, afin de nous assurer que l’UE tiendra son engagement à éradiquer la pauvreté.

Simon Stocker est directeur d’Eurostep

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